Mis à jour le 21-Déc-2011 9:57
 
 
 
 
RECIT DE FRANCIS MENGIN
   

Mon Raid Extrême Vosgien

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Cela faisait déjà un p’tit moment que j’avais ce rêve en tête, et je me suis dit que c’était cette année ou jamais. Alors j’ai pris part à cette édition du raid Extrême Vosgien, cher à Jean Claude Arens, aussi organisateur de la cyclosportive « Les 3 ballons ».
Un parcours extrême mais de rêve au cœur des Hautes Vosges et en plus autour de chez moi !
Quand j’ai découvert ce parcours en début d’année, je l’ai tout de suite tracé dans ma tête et il s’y est gravé dès le début.
Je le connaissais donc par cœur, dans ses moindres détails et c’est sans préparation spécifique que je me suis présenté au départ. Un entraînement dans les cols vosgiens ces deux derniers mois, 6500 kms dans les jambes et 34 années de compétition devaient me suffire pour aborder cette course avec une certaine sérénité.
J’ai choisi de faire le parcours en semi assistance avec une voiture suiveuse pour la nuit par mesure de sécurité et le reste tout seul. Je remercie mon épouse Sylvie et mon fils Erwan. .

Km 0 : 11h , départ précis devant la mairie de Champagney, 28 courageux partent tranquillement sous les yeux de quelques spectateurs et accompagnateurs.
Km 10 : je me laisse glisser à l’arrière pour mémoriser les concurrents et échange quelques mots avec Jean Marc Velez ( le seul Français ayant terminé la RAMM , course transaméricaine de 5000 km en 11 jours). Il me parle de sa récente fracture du bassin et de sa convalescence. Tu parles d’une rééducation !!! Respect à lui. Il me dit également que Huges Rico (n° 1 français) devrait se bagarrer avec Laurent Boursette, ce qui fut bien le cas. Pascal Bride, dit « la moulinette » sera aussi de la fête.
Km 15 : les premières rampes arrivent vite, je me place devant pour voir le fameux coup de pédale en danseuse de Rico, ce sera pour moi la seule occasion de le regarder danser…, C’est vrai qu’il a un style bien à lui. Mais à ce moment de la course, c’est bien la Moulinette qui imprime le rythme. Je ne reste pas longtemps derrière eux, je comprends tout de suite que je ne les reverrai plus. Je monte alors à mon rythme le ballon de Servance. Je m’étais fixé 145 pulsations maxi et je suis déjà presque à 160 ; je relâche donc mon effort et passe le sommet en 8ème position. Il y a déjà de gros écarts en 23 km….
Km 25 : j’attaque prudemment la première descente récemment goudronnée.
Km 29 : col des Croix, j’arrive à un croisement avec un vrai stop ! Bien signalé ! Quelques spectateurs, mais surtout des accompagnateurs attendent leur coureur. En effet, les voitures d’assistance étaient jusque là interdites dans la traversée de la zone protégée de la forêt du ballon de Servance. Là, petite frayeur, parmi eux, un homme en bleu avec stylo et papier ! Je donne tout sur les freins pour piler et poser le pied sur la bande du stop !!!! Après coup, je ne vois pas de gendarme. Il s’agit sûrement d’un suiveur qui prend les écarts. Ouf !!! Dans la descente vers Le Thillot, j’y repense et me dis que je dois bien être le seul a avoir marqué ce stop...
Km 33 : je suis obligé de m’arrêter pour prendre mes bidons dans le coffre de ma voiture d’assistance et quelques coureurs me passent.
Puis, je me retrouve vite dans la montée du Ballon d’ Alsace.
Km 55 : je me fais plaisir dans les virages techniques de la descente sur Sewen, avec Jean Paul Briot. Une moto n’arrive pas à nous lâcher. Le conducteur, certainement excédé, finit par se garer un peu avant le lac d’Alfred , et à nouveau du plaisir dans les derniers lacets.
Km 66 : Sewen, cette fois, je laisse la fontaine du village où je m’arrête habituellement lors des « recos » pour filer à 38 km/h, vent dans le dos. Le retour sur Giromagny sera plus dur avec cette fois un vent contraire.
Km 96 : comme j’ai horreur d’avoir les mains collantes à cause des aliments sucrés, je m’arrête pour me rincer les doigts et laver mes leviers de frein. Au moment où je repars, ma sœur Edith me fait un p’tit coucou ! “ Désolé , je n’ai pas le temps de m’arrêter .
Km 105 : dans la montée du ballon, je suis 100 m derrière Jean Paul. Tout à coup, il s’arrête et saute dans la rigole pour se rafraîchir les pieds. Bizarre, il ne fait pas si chaud !!! Je me dis : « Il est déjà mal ! Mais, il ira bien au bout ! »
Km 116 : « ravito » du ballon, je signe la feuille, avale un mini sandwich, enfile mes manchettes et plonge sur St Maurice tout en restant prudent vers la Jumenterie à cause du gravillonnage récent.
Km 124 : au stop à St Maurice, je rencontre un bouchon avec beaucoup de motos, je coupe à gauche, ouf je m’en sors bien !
Km 129 : Le Thillot , je passe sur le trottoir pour éviter le feu rouge.
Km 135 : Travexin, Sylvie et mon fils Emeric sont là pour me passer deux bidons et un morceau de gâteau sport.
Km 165 : montée du Markstein, j’aperçois un cycliste qui me rattrape très vite, il arrive à ma hauteur. Ouf !! il n’a pas de plaque sur son vélo, c’est un gars du coin qui fait sa petite sortie de fin de semaine. « Alors, on fait sa petite sortie du soir !!!!»
Je souris et lui dit : «Une petite grande sortie alors !!! Quand je lui dis qu’il me reste 350 km , il est vraiment surpris, c’est le moins que l’on puisse dire et je le laisse filer devant moi .
Km 175 : tout se passe bien sur la route des crêtes.
Km 183 : j’attaque la descente de la route des Américains, descente très technique, sûrement la plus dangereuse du parcours, surtout quand on ne la connait pas .
Km 192 : la Bresse, comme le prévoit le règlement, il est possible d’emporter un téléphone portable (bien utile lorsque l’on est seul), j’appelle Sylvie pour le « ravito » de Grosse Pierre. Frayeur, elle m’annonce que j’ai oublié mes lampes dans ma voiture au départ !! Je suis surpris et doute un peu, je suis sûr de les avoir mises dans le coffre, la veille au soir. Je monte le col un peu contrarié. Beaucoup de gens de ma famille m’attendent, je m’arrête et soulagement, je retrouve les fameuses lampes sous les sacs. Je me change, essaie de manger quelques pâtes, installe les lampes et mes mon gilet fluo (« Il est moche, il est jaune, il ne va avec rien, mais il peut sauver la vie !!!Pub !!! ). Je m’affole un peu dans la descente sur Gérardmer. A ce moment de la course , je suis 6ème, suivi de peu par l’Alsacien Philippe Messerlin . On restera ensemble jusqu’au col de Wettstein.
Km 238 : au col du Bonhomme, deux très beaux ânes me regardent passer, je pense revenir les prendre en photo.
Km 244 : contrôle du col du Calvaire, pas trop d’appétit. Je ne m’attarde pas, je me sens mieux sur le vélo plutôt que debout devant la table.
Il fait très frais sur les crêtes Vosgiennes entre le jour et la nuit. Mais, que les Vosges sont belles dans ces moments là !!
Je rappelle Sylvie pour être sûr qu’Erwan m’attende bien au col de la Schlucht . Grrrrrrrrrr, il n’est pas là ! !! Je ne vais quand même pas bien vite !!! Mais, surprise, il y a quand même du monde pour moi : mon beauf Bruno avec mes nièces Zelie, Guenolé et Candice sont venus m’encourager. Merci à eux. Un petit arrêt pour enfiler un coupe vent puis j’allumer mes lampes et plonge sur Soultzeren .
En bas, j’aperçois les deux gyrophares des premiers qui filent déjà vers Munster : ouahhhh, ils ont bien une heure trente d’avance sur moi .
Erwan me rejoint en voiture à la mi- col de Wettstein.
Km 276 : au sommet, changement complet de fringues, échange de bidons et Messerlin est déjà là. Il me demande si tout va bien, «Oui, c’est bon ». Tout va bien en ce début de nuit encore sèche...
Km 302 : contrôle du Collet du Linge, je prends un coupe vent et c’est reparti dans la descente de Horodberg, belle descente technique de nuit, super moment, je relance bien après les épingles à cheveux comme si l’arrivée était en bas : un vrai moment de pur bonheur.
Km 313 : deux gros morceaux arrivent, le petit Ballon et le Platzerwasel. C’est très dur dans les premières rampes avec un fort pourcentage. Je suis à la limite des crampes, merci le 34 x 27. Je vois plus mes « puls » sur mon compteur et ma fois, c’est pas plus mal du tout !!! C’est long , mais ça va aller. Et même de nuit, je sais exactement où je me trouve. Tiens, je vois le gyrophare de Philippe au niveau de la ferme auberge du petit Ballon, on mange un morceau ensemble au sommet .
Km 324 : je descends juste devant lui mais, il descend mieux que moi, il doit mieux connaître. Il me dépasse vite dès les premiers mètres de la très dure montée du col de Platzerwasel. Je le laisse filer, les trois derniers kilomètres sont encore plus pénibles avec un gros gravillonnage récent, danseuse impossible .
Km 350 : les premières gouttes de pluie apparaissent pour le changement de chauffeur au Markstein , je m’arrête à peine.
Km 357 : le Grand Ballon, il pleut bien, 7° et déjà 3 heures du mat. Mais je vais encore pas mal, je me change pour la descente vers le col Amic.
Km 363 : toujours accueilli par le sourire, je signe la feuille de contrôle du col Amic. Je ne peux que boire un thé doux sucré et c’est reparti pour la boucle de Soultz. Vers le Veil Harmand , je croise un faon qui passe à cinq mètres de ma roue avant, une chance que la route soit plate !!! Un peu plus loin, un renardeau court devant moi sur une quarantaine de mètres, inoubliable...
Km 385 : seul endroit que je n’ai pas reconnu. J’arrive au feu à Soultz, je ne vois pas la pancarte m’indiquant le col Amic, il y a juste une petite voiture arrêtée au feu. Je m’approche pour demander ma route mais les deux jeunes filles prennent peur et redémarrent en trombe en grillant le feu rouge. J’attaque la longue montée avec ses fameux nids de poules près du camping. Hop là , une grosse grenouille me regarde à travers les phares, au milieu de la route ruisselante.
Km 397 : retour au ravito du col Amic, ça roule bien mieux sur le haut ! Et rethé doux sucré et p’tit pipi …Hop, on bascule vers la vallée .
Km 405 : Willer sur Thur, je m’arrête sous une station service pour me changer une dernière fois, sous les yeux étonnés d’un piéton, normal je pense pour un dimanche à 6 heures du mat. Ma voiture me quitte là. Je me retrouve seul pour faire le reste. J’escalade le col de Hunsruck, pas bien vite...
Km 422 : Masevaux, c’est là que j’ai mon p’tit coup de moins bien, mes yeux se ferment, mais je trouve une astuce : comme il pleut toujours, je me passe un coup de gant mouillé sur la figure, ça réveille bien !!! Mais, il faut aussi bien boire et manger.
La montée du Ballon d’Alsace se passe finalement assez bien.
Km 456 : je fais le plein de mes bidons à une fontaine de Giromagny, il y a encore de la route et de surcroît assez bosselée jusqu'à Plancher Bas.
Km 464 : dernier contrôle et là surprise, le gars m’annonce que l’organisateur supprime la dernière boucle du col des Croix par mesure de sécurité à cause de toute la pluie de la nuit. je suis presque déçu !!! Enfin, en y réfléchissant bien, tout le monde est quand même content !!! Je repars donc de plus belle vers la dernière montée, celle de la Planche des Belles Filles, mais là, plus dur : des passages à 17% après 470 kilomètres, ça calme et ça reste gravé à jamais. OUF, j’y suis !! Tiens pas de belles filles ………..

Résumé : 475 km, 23h 21, 11 000 mètres de dénivelé et 21,56 de moyenne avec environ 30mn d’arrêt, pas d’ennuis particuliers, juste les genoux douloureux, un peu la nuque aussi, bien sûr un bon mal aux cuisses et les fesses nickelles (ce que je craignais le plus). Donc, je suis très satisfait de moi, mais c’est quand même un truc de fous. Avis aux amateurs pour 2009.

Francis Mengin

 
     
 
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